Le roi des Morgans, ébloui par la beauté de Mona Kerbili, saisit ladolescente et lemporta au fond de leau. Dans le palais, au milieu des richesses abyssales, Mona, resplendissait. Le vieux roi en était fou amoureux. Son fils aussi... Le vieux Morgan refusa lalliance des deux jeunes gens. Il força son fils à se marier avec lenfant unique dun des grands de sa cour. La noce fut belle : on mangea, on but abondamment.
Or, le soir de la fête, le père cruel décida de mettre à mort Mona, la fille de la terre.
F-M. Luzel, dans lun de ses contes, décrit la scène. "Vers minuit, les nouveaux mariés se retirèrent dans leur chambre nuptiale, magnifiquement ornée, et le vieux Morgan dit à Mona de les y accompagner et dy rester, tenant à la main un cierge allumé. Quand le cierge serait consumé jusquà sa main, elle devait être mise à mort. La pauvre Mona dut obéir. Le vieux Morgan se tenait dans une chambre contiguë, et, de temps en temps, il demandait :
![]() |
- Le cierge est-il
consumé jusquà votre main ? - Pas encore répondait Mona. Il répéta la question plusieurs fois. Enfin, lorsque le cierge fut presque entièrement consumé, le nouveau marié dit à sa jeune épouse : - Prenez, pour un moment, le cierge des mains de Mona, et tenez-le, pendant quelle nous allumera un feu. La jeune Morganès, qui ignorait les intentions de son beau-père, prit le cierge. Le vieux Morgan répéta au même moment sa question : - Le cierge est-il consumé jusquà votre main ? - Répondez oui, dit le jeune Morgan. - Oui, dit la Morganès. |
Et aussitôt le vieux Morgan entra dans la chambre, se jeta sur
celle qui tenait le cierge, sans la regarder, et lui abattit la
tête, dun coup de sabre ; puis il sen alla."
Le lendemain, lorsquil saperçut de sa
méprise, le roi entra dans une grande colère. Puis il
sapaisa et donna son consentement au mariage de son fils et
de Mona.
Mais
Mona sennuyait de son île bretonne. Elle obtint enfin
lautorisation de retourner dans sa famille. Elle y fit
sensation. Puis le vent chassa jusquau moindre souvenir de
ses aventures sous-marines. Jusquau jour où le jeune roi
vint la chercher. La jeune fille se jeta dans ses bras... et on
ne la vit plus, à jamais.
On peut retrouver une adaptation de la légende des
"Morgans de lîle dOuessant", de F-M.
Luzel, dans Contes, récits et légendes des pays de France,
rassemblés par Claude Seignolle (éditions Omnibus).